31 AOÛT AU 8 SEPTEMBRE 2002
Exposition de portraits
Sibylle Jaquerod

« Je ne sais pas exactement ce qui se trouve au fond de moi, ce que je jette sur le papier me permet de le découvrir. Ce qui me fait repousser mes propres limites. Alors que nombre de questions que je me pose me dissuaderaient plutôt de continuer. Mais je crois que c’est le rôle de l’artiste de persévérer, quels que soient les obstacles, même ceux qu’il dresse en lui-même ».
SIBYLLE JAQUEROD est née à Zürich en 1957. Elle vit et travaille à Lausanne, où elle a son atelier, avenue Marc-Dufour 9. Elle collabore activement à l’Association visa rte pour la promotion des artistes suisses.


FRANÇOISE JAUNIN, 24 Heures, juin 2000
« C’est sa passion exclusive, son inlassable fascination, l’unique objet de son désir : Sibylle Jaquerod peint des têtes. Des visages. Des regards. Car l’enjeu est d’abord là : traquer le grand mystère des regards. Ceux qui vous empoignent frontalement, mais aussi les fuyants, les absents, les baissés. La Lausannoise les dessine à l’encre de chine, directement à la pipette, à partir de photographies qu’elle a prises elle-même ou reprises dans des livres d’art ou des magazines, puis elle les peint librement à l’acryl dilué pour rendre la matière plus fluide et rapide. Elle a besoin de faire vite, dans l’urgence de l’instant, pour saisir l’expression furtive, l’intensité du regard, les jeux d’ombres colorées sur la géographie faciale. Sans possibilité de correction, ni de repentir.
Ça passe ou ça casse. Parfois ça casse et ça finit à la poubelle. Et elle passe à la suivante, dopée et droguée par une sorte d’envoûtement. Les résultats sont inégaux : parfois vigoureusement croqués et fougueusement « jetés » sur le papier, avec une belle qualité de présence, mais parfois plus lâches, plus faciles et accrocheurs. Le portrait, rappelle Balthus qui s’y est colleté tant de fois, reste le genre le plus difficile qui soit ».
LAURENCE ARTHUR, Le Matin, juin 2000
« Inutile de rechercher les paysages dans les œuvres de Sibylle Jaquerod ou alors seulement ceux, tourmentés, de l’âme, traversant le regard de ses portraits. […]
Depuis quinze ans, Sibylle Jaquerod ne peint que des portraits. Les visages inconnus sortis de son imagination sont noirs, au propre comme au figuré, barbouillés parfois de rouge violent à l’acrylique pour les plus expressifs. Le trait fondu du lavis est libre et dessine les contours de personnages travaillés par les émotions. C’est cinglant comme une gifle. D’ailleurs, l’artiste confie les peindre très vite, sans croquis préalable, comme d’un seul mouvement, semblable à un instantané. À ce propos, en plus de sa formation aux Beaux-Arts de Lausanne, Mme Jaquerod est aussi photographe. Cela explique sûrement son attachement à rendre un moment fugace : le regard d’un jeune homme qui se retourne, l’expiration, oles yeux fermés, d’une femme à la quête de l’oubli du moment présent. Les interprétations divergent sur les attitudes : « Les portraits ont leur propre vie. Chacun peut s’y adapter. Au fil du temps, ils deviennent familiers ». C’est pourquoi les titres sont inutiles.
Pas un seul visage n’est pareil, et pourtant ils sont tous autant de portraits émotionnels de l’artiste. À l’opposé de cette exhibition de sentiments intérieurs, elle semble réservée. Le contraste est frappant, la sensibilité, il est vrai, comme elle le souligne elle-même dans sa présentation de l’exposition, est à fleur de peau. Dans sa dernière œuvre, elle utilise la couleur par couches épaisses, son style a changé, le lavis a disparu et le portrait semble plus serein.
Sibylle Jaquerod explore également la sculpture. Elle utilise du bois flotté, du papier mâché, des plumes et tout ce qui lui tombe sous la main pour reproduire des têtes, comme des réductions, trophées de guerriers et non plus des visages. Les corps sont suggérés par une forme évocatrice simple. L’artiste a-t-elle donc fait un sort à ses démons ? ».
EMMANUELLE RYSER, 24 Heures, mars 2001
« À travers des portraits tendres et souvent épurés, Sibylle Jaquerod laisse transparaître son obsession des têtes jusque dans ses titres : Casse-tête, Esthète ou Entêtée… Une touche d’humour (noir ?) qui rend la rencontre plus légère. Car c’est l’intime qui se dévoile. Et trouble le visiteur ».
|